Page:Casanova Histoire de ma fuite 1788.djvu/213

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aucun des bords rien où je puſſe aſſurer un bout de ma corde pour me deſcendre dans un lieu où je me ſerois vu ſûr, j’étois dans la plus grande perplexité. Il ne falloit penſer ni au canal, ni à la cour du palais. Le deſſus de l’égliſe n’offroit à ma vue que des précipices entre les coupoles, qui n’aboutiſſoient à aucun endroit non fermé : pour aller au delà de l’égliſe vers la canonica j’aurois dû gravir ſur des déclivités courbes : il étoit naturel que je dépêchaſſe pour impoſſible tout ce que je ne concevois pas faiſable. J’étois dans la néceſſité d’être téméraire ſans imprudence : c’étoit un point de milieu dont la morale ne connoît pas, à ce que je crois, le plus imperceptible.

J’ai arrêté ma vue, et ma penſée ſur une lucarne, qui étoit du côté du canal, à deux tiers de la pente. Elle étoit aſſez éloignée de l’endroit d’où j’étois ſorti pour me rendre certain que le grenier qu’elle éclairoit n’appartenoit pas à l’enclos des priſons que j’avois briſé : elle ne pouvoit donner que dans quelque galetas, habité ou non, au-deſſus de quelqu’appartement du palais, où au commencement du jour j’aurois trouvé les portes naturellement ouvertes. Les ſervans du palais, ou ceux de