Page:Casanova Histoire de ma fuite 1788.djvu/263

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

remplacer les désagrémens de ſa perſonne par les bonnes manières, ou par l’argent, je me pâmois de rire le voyant ſouvent régalé des ſoufflets qu’il recevoit des Maritornes du Tyrol avec une réſignation angélique. Il me trouvoit avare, et vilain, parceque je n’ai jamais voulu lui donner de l’argent, avec lequel il auroit eſpéré de ſéduire leur vertu.

Je fus me loger au cerf, où j’ai d’abord ſu que deux jeunes frères venitiens de l’illuſtre famille Cont… étoient là depuis quelque tems, accompagnés par un comte Pomp… veronois, mais n’étant pas connu d’eux, je n’ai pas penſé à aller les voir, d’autant plus que je n’avois plus beſoin de rencontrer des hermites. Je fus faire ma révérence à la comteſſe de Coronini, qui m’avoit connu à Veniſe, et qui étoit fort-bien en cour.

Cette illuſtre dame âgée de ſoixante et dix ans m’a très-bien reçu, et m’a promis de parler à l’électeur pour me faire obtenir la ſûreté de l’azile. Elle me l’a annoncée le lendemain pour moi, mais non pas pour mon camarade, car l’électeur ne vouloit pas avoir des démêlés avec les ſomasques, dont un couvent étoit dans Munick ; ils auroient pu prétendre d’avoir des droits ſur le père Balbi en