Page:Casanova Histoire de ma fuite 1788.djvu/264

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qualité de membre fugitif de la religion : la comteſſe me conſeilla de le faire d’abord ſortir de la ville pour aller ſe recouvrer ailleurs, et éviter ainſi quelque mauvais tour que les moines ſes confrères pouvoient lui jouer.

J’ai d’abord été chez le jéſuite confeſſeur de l’électeur pour obtenir de lui quelque recommandation dans quelque ville de l’empire en faveur de cet infortuné. Le jéſuite me reçut fort-mal : il me dit par manière d’acquit qu’à Munick on me connoiſſoit à fond : je lui ai demandé d’un ton ferme, s’il me donnoit cet avis comme une bonne, ou comme une mauvaiſe nouvelle, et il ne m’a pas répondu. Il m’a laiſſé là ; et quelqu’un me dit qu’il étoit allé pour vérifier un miracle tout récent, dont toute la ville parloit. Un prêtre qui étoit là me dit que l’impératrice veuve de Charles VII. morte dans ces jours là avoit, quoique morte les pieds chauds, et que je pouvois aller voir cela moi-même, ſi j’en avois envie, puisque ſon corps étoit expoſé au public. Ce miracle m’intéreſſa, car j’avois toujours froid aux pieds : il me prit envie d’aller voir le prodige, et m’étant mis à genoux pour aſperger l’auguſte morte, j’ai réellement trouvé ſes pieds chauds ; mais c’étoit