Page:Casanova Histoire de ma fuite 1788.djvu/265

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l’effet d’un poële ardent, qui étoit très-près de ſes mêmes pieds. Un danſeur que j’ai vu là, et qui me connoiſſoit beaucoup, me fit compliment, et m’invita à dîner. Sa femme, venitienne, jolie, et remplie de talent, que j’avois connue enfant, me fit le plus gracieux accueil, et me voyant embarraſſé à cauſe de mon camarade, que je ne voulois pas abandonner, elle m’a offert une lettre de recommandation à Augsbourg au chanoine Baſſi doyen du chapître de S. Maurice, qui étoit ſon ami. J’ai accepté cette lettre qu’elle écrivit d’abord, et j’ai fait partir mon compagnon à la pointe du jour dans une bonne voiture lui promettant de penſer à lui dans le cas que la recommandation n’eût pas la force, dont il avoit beſoin. Quatre jours après j’ai ſu par ſa lettre même qu’on l’avoit accueilli, logé, vêtu en abbé, préſenté au magiſtrat, et au prince évêque. Outre cela l’honnête, et noble doyen lui avoit promis d’avoir ſoin de lui jusqu’à ce qu’il eût obtenu de Rome une diſpenſe de ſes vœux monaſtiques, et un plein pardon de la république. Il finiſſoit ſa lettre par me demander quelques cequins pour ſes ménus plaiſirs, car il étoit trop noble, diſoit-il, pour en de-