Page:Casanova Histoire de ma fuite 1788.djvu/267

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Les plombs en quinze mais me donnèrent le tems de connoître toutes les maladies de mon eſprit, mais je n’y ai pas demeuré aſſez de tems pour me fixer à des maximes faites pour les guérir. Madame Rivière partit de Munick le 18 de Décembre m’aſſurant qu’elle s’arrêteroit à Strasbourg huit jours. Dans le même jour, j’ai reçu de l’argent de Veniſe, et je ſuis parti ſeul le lendemain. Sept heures après mon départ, je me ſuis arrêté à Augsbourg non pas tant pour voir le père Balbi, comme pour avoir la ſatisfaction de connoître l’aimable Doyen, qui en avoit agi en prince vis à vis de mon malheureux compagnon ſur la ſimple recommandation d’une danſeuſe.

Je l’ai trouvé habillé en abbé, mal poudré, bien logé, et bien ſervi. Le doyen n’étoit pas en ville. Il me dit, que quoiqu’il ne lui manquât rien, il ſe trouvoit dans la miſère, car il n’avoit pas le ſou, et qu’il étoit étonnant que le doyen, qui le ſavoit, ne lui donnât pas de tems en tems quelque couple de ducats. Je lui ai demandé, pourquoi il ne ſe faiſoit pas envoyer de l’argent par les nobles venitiens ſes frères, ſes couſins, ſes oncles, ou par quelques amis, et il me