Page:Casanova Histoire de ma fuite 1788.djvu/90

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verrou devenu eſponton gros comme une canne, et long vingt pouces, dont la belle pointe acérée me démontroit qu’il n’eſt pas néceſſaire de rendre le fer acier pour parvenir à la faire, j’ai vu que je n’avois qu’à faire un trou dans le plancher de mon cachot ſous mon lit.

J’étois ſûr que la chambre deſſous ne pouvoit être que celle où j’avois vu M. de Cavalli : j’étois ſûr qu’on ouvroit cette chambre tous les matins, et j’étois ſûr de pouvoir me couler facilement du haut en bas dès que le trou ſeroit prêt, moyennant mes draps de lit dont j’aurois fait une eſpèce de corde en aſſurant le bout d’en haut à un chevalet de mon lit. Dans cette même chambre je me ſerois tenu caché ſous la grande table du tribunal ; et le matin d’abord que j’aurois vu la porte ouverte, j’en ſerois ſorti, et avant qu’on eût pu me ſuivre je me ſerois mis en lieu de ſûreté. Je penſois qu’il étoit vraiſemblable que Laurent laiſſât dans cette chambre un de ſes archers pour garde, et pour celui-là je l’aurois d’abord tué en lui enfonçant dans le gozier mon eſponton. Tout étoit bien imaginé ; mais la difficulté conſiſtoit en ce que le trou ne pouvoit être fait ni dans