Aller au contenu

Page:Castor - Le pays, le parti et le grand homme, 1882.djvu/10

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 13 —


VI


Toujours le même, cet enfant terrible !

Tout subordonner, chefs et compagnons, principes et hommes, parti et patrie, à son avancement personnel : tel fut en tout temps son programme.

Dès 1862, il ourdit avec Labelle la conspiration des jeunes ! première origine du Club St.-Jean-Baptiste et de je ne sais quelles autres organisations ténébreuses dont nous avons depuis ressenti la pernicieuse influence.

Labelle ! plus renard, mais beaucoup moins patient que Chapleau ! Labelle, qui moins d’un an après, mettait en œuvre le plan arrêté par les deux, en se présentant contre Cartier.

Quelle précieuse phalange que celle des jeunes conservateurs de ce temps-là ! Ce n’est pas alors que l’organe de MM. Chapleau, Senécal, Dansereau & Cie eût osé écrire : « L’on a vingt ou vingt-cinq ans, l’on se croit du talent et l’on estime que l’on peut aspirer à tout. Nous avons poussé nos dents de lait, nous nous trouvons du génie et nous considérons que tout nous est dû… Pauvres enfants ! pauvres fous ! faites donc vos preuves d’abord, etc.”

Jamais encore on n’avait vu à Montréal un groupe d’hommes aussi remarquables tant par le nombre et le talent, que par le savoir et le patriotisme.

Malheureusement, dans ce troupeau choisi, il y avait des loups. Bientôt, la contagion se glissa parmi eux. J’ai sous les yeux le récit de la première organisation, tel que l’écrivait à Montréal l’un des membres de cette brillante jeunesse invitée à faire partie du mouvement. Il résume dans les termes suivants le discours de Ludger Labelle, le promoteur principal de l’organisation.

Voyez comme ces enfants terribles savaient déjà mordre avec leurs « dents de lait » :

“ Mes amis, disait-il, nous formons à peu près ce que la jeunesse conservatrice renferme de plus fort dans ses rangs, tant par le talent que par la science, l’éducation et les relations sociales. Déjà nous avons rendu à nos chefs des services signalés. C’est nous qui, dans une grande mesure, avons fait le travail électoral aux dernières élections, et qui avons, par notre action, assuré le triomphe du parti. Si nos chefs retirent aujourd’hui les bénéfices du pouvoir, c’est, dans une très grande mesure, à nous qu’ils le doivent. Nous sommes donc une puissance et une puissance considérable. Si nous sommes aussi forts tels que nous sommes, sans organisation, qu’en serait-il donc si nous étions formés en société ! Nous venons de tous les points du Bas-Canada ; nous avons des amis et des alliés à peu près partout. En enveloppant tous ces alliés et ces amis dans