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Aujourd’hui, il est facile de reconnaître la succession en ligne directe de cette organisation dans le groupe Chapleau, Dansereau & Cie, ou si l’on veut la « bande à Senécal. »


VIII


Dès les années qui suivirent, Labelle voulut, comme nous l’avons dit, faire servir l’organisation à son profit, en luttant contre Cartier lui-même. Il fut abandonné par ses associés. Non pas que ce fut le dévouement au vieux chef qui l’emportât sur les engagements du parti des jeunes ; mais l’un des principes fondamentaux de l’association étant l’égoïsme, le mobile principal l’avancement personnel ; la plupart trouvèrent plus d’avantage personnel à suivre M. Cartier. L’organisation reçut de cette division un terrible choc ; mais la paix se fit peu de temps après, et l’on se remit à tirer sur les mêmes ficelles.


IX


En 1867, on retrouve M. Chapleau faisant sonner bien haut son admiration sans réserve pour Cartier et ses œuvres, son obéissance aveugle à ses chefs. Cela n’empêche pas qu’il s’arme du marteau du démolisseur, et commence à saper à sa base le monument de la confédération auquel le grand chef n’avait pas encore mis la dernière main. Le double mandat le gêne : il dénonce violemment le double mandat ! La qualification foncière répugne aux libéraux ; elle ne lui va guère à lui non plus, lui qui n’a pas un pouce de terre sous le soleil : il condamne la qualification foncière.


X


En 1871, le gouvernement conservateur, tout composé de vétérans, fonctionne à merveille ; mais Chapleau n’en est pas. On a beau lui jeter à pleines mains, pour lui et les siens, places, jobs, causes de la couronne, etc., ça ne fait pas ; il faut qu’il agite, il faut qu’il conspire.

Fabre et lui, courant à la curée, se rencontrent venant de directions opposées. D’un coup d’œil, ils se mesurent, se pèsent, s’apprécient, se comprennent. Ennemis l’instant d’auparavant, les voilà qui, l’instant d’après, chassent ensemble sous des couleurs opposées. Fabre réorganise au profit de Chapleau le mouvement des jeunes. Trois mois après, Chapleau était ministre… et l’avenir de Fabre assuré.

C’est bien M. Chapleau lui-même qui disait alors, sinon en paroles, du moins en action :

« Nous n’avons rien fait encore, mais nous nous sentons capables