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Page:Catherine-pozzi-agnes-1927.djvu/16

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Vous seul feriez de l’heure un moment extraordinaire, et vous manquez. L’heure irait jusqu’aux étoiles, et jusqu’à l’extrême fond du cœur. Elle s’écoule, et creuse dans l’espace une place infinie, et passe, et choit dans le passé.

Qui est-ce qui les recueille, ces heures-là, qui n’ont servi à rien ? Quelquefois je crois qu’il est à l’envers du monde un endroit où elles sont conservées, où elles tombent comme de l’eau pure, où les morts les boivent, pour être heureux.

Tout cet amour qui n’est pris par personne, qui sait où il va ? Mais moi, je vous force avant le temps, comprenez-vous, je vous ai. Quand l’heure viendra, quand je serai prête, avec la robe, et le cœur, — quand je dirai : « maintenant, maintenant, » et que vous ne viendrez pas (comme tant d’autres fois où vous n’êtes pas venu), je ne laisserai pas ce que j’ai de meilleur se dissiper jusqu’à l’autre bord du monde.

Je m’assieds, je vous écris, amour, je vous l’envoie.