Page:Catherine de Sienne - Le Dialogue, Hurtaud, 1913, I.djvu/231

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vous tue. Mais si l’homme ne livre pas au démon ce glaive de la volonté, je veux dire, s’il ne consent pas aux tentations, à ses provocations, jamais aucune tentation ne pourra le blesser et le rendre coupable de péché : elle le fortifiera au contraire, en éclairant son intelligence sur ma charité et en lui faisant comprendre que c’est par amour que je vous laisse tenter, pour vous faire aimer et pratiquer la vertu. Car l’on en vient à aimer la vertu que par la connaissance que l’on prend de soi-même et de moi. Et cette connaissance, c’est surtout dans le temps de la connaissance qu’elle s’acquiert. C’est alos que l’homme apprend bien qu’il n’est pas l’être même, puisqu’il ne peut faire disparaître des ennuis et des embarras qu’il souhaiterait pourtant d’éviter ; et il me connaît aussi Moi dans sa volonté, que ma Bonté rend assez forte pour ne pas consentir à ces pensées. Il voit bien que c’est ma charité qui en dispose ainsi : car le démon est faible ; il ne peut rien par lui-même, sinon qu’autant que je le lui permets. Et moi, c’est par amour que je vous laisse tenter et non par haine, pour votre triomphe, non pour votre défaite ; c’est pour que vous parveniez à la parfaite connaissance de vous-même et de moi ; c’est pour que votre vertu fasse ses preuves, et elle ne peut être éprouvée que par son contraire.

Tu vois donc bien que les démons sont à mon service pour tourmenter les damnés de l’enfer, et en cette vie pour exercer et procurer la vertu dans les âmes. Non que l’intention du démon soit de promouvoir votre vertu, car il n’a pas la charité et