Page:Catherine de Sienne - Le Dialogue, Hurtaud, 1913, I.djvu/322

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qui leur convient. Après d’être délectés dans une certaine joie spirituelle dont je les avais favorisés, ils ne veulent plus s’en séparer dans leur passage. Parfois même, ils sont si ignorants, que lorsque je les visite d’une autre façon, ils feront de la résistance, ils ne recevront pas ce nouveau don : ils voudront toujours celui qu’ils ont imaginé. Voilà l’attache au plaisir personnel, à la délectation du plaisir spirituelle que l’esprit trouve en moi ! Oui, voilà le défaut !

Et quelle illusion ! Il serait impossible à l’âme de demeurer continuellement dans le même état. L’âme ne peut rester immobile dans la vertu : il faut qu’elle avance ou qu’elle recule. Et de même l’esprit ne saurait se maintenir fixé en moi dans une unique jouissance, en sorte que ma bonté n’aie plus à lui en donner d’autre. Je la renouvelle au contraire et avec une grande variété. Tantôt je fais jouir de l’allégresse spirituelle ; tantôt j’inspire une douleur et un repentir qui ébranle l’esprit juqu’au fond de lui-même ; parfois je serai dans l’âme et elle ne me sentira pas. D’autrefois ma volonté représentera la Vérité, mon Verbe incarné, sous différentes formes devant l’œil de son intelligence, sans que l’âme paraisse éprouver cette impression d’ardeur et de joie qu’elle croyait devoir ressentir dans cette contemplation. En une autre circonstance, elle ne verra rien et n’en goûtera pas moins une très grande douceur.

Tout cela, c’est par amour que je le fais, pour conserver et accroître en elle la vertu d’humilité et