Page:Catherine de Sienne - Le Dialogue, Hurtaud, 1913, II.djvu/219

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et embrasés du feu de la divine charité. C’est par ces moyens, et une infinité d’autres, que je les achemine à l’union parfaite, comme je t’ai dit. Ils parviennent ainsi à une union si complète, et à une connaissance si pleine de ma bonté, que, bien qu’encore dans un corps mortel, ils n’en goûtent pas moins le bonheur des immortels, et tout en demeurant dans la prison du corps, il leur semble qu’ils en sont sortis. Comme ils m’ont ainsi beaucoup connu, ils m’aiment davantage, et qui aime beaucoup, se tourmente aussi beaucoup ; aussi, leur tourment s’accroît-il en même temps que leur amour. Et quel tourment endurent-ils donc ? Ce ne sont ni les injures qu’ils ont subies, ni les souffrances de leur corps, ni les assauts du démon, ni aucune autre contrariété qui leur pourrait advenir à eux personnellement. Rien de tout cela ne les peut affliger. S’ils se lamentent, c’est des offenses qui me sont faites à moi, en voyant et en éprouvant que je suis digne d’être aimé et servi ; c’est de la perte des âmes, qu’ils voient s’enfoncer dans les ténèbres du monde, et tomber dans un tel aveuglement. Car dans cette union que l’âme a contractée avec moi par sentiment d’amour, elle regarde et connaît en moi l’ineffable amour que j’ai pour mes créatures ; elle voit qu’elles représentent mon image, et elle s’éprend d’amour pour elles pour l’amour de moi. De là l’intolérable tourment qu’elle éprouve quand elle les voit se séparer de ma bonté. si grande est cette douleur que toute autre peine ne lui semble plus rien en comparaison, et qu’elle