Page:Catherine de Sienne - Le Dialogue, Hurtaud, 1913, II.djvu/307

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faire de cette vie même la vie éternelle, et l’Ordre veut qu’il soit voyageur, et sans cesse le lui rappelle. Dès qu’il commence à s’attacher à un lieu, où il serait heureux de se fixer pour son plaisir, il reçoit une autre destination. Le voilà encore dans la peine, parce que sa volonté propre vit toujours, toujours prête à dire non mais, s’il ne se soumet pas, il s’expose aux corrections et aux châtiments, prévus par la discipline de l’Ordre. Et c’est ainsi pour lui un continuel tourment.

Tu vois donc combien il se trompe lui-même ! C’est en voulant fuir les peines qu’il s’y précipite, parce que son aveuglement l’empêche de connaître la voie de la véritable obéissance, qui est une voie de vérité, tracée par l’Agneau obéissant, mon Fils unique, qui en a aplani toutes les aspérités. Et le voilà, s’engageant dans la voie du mensonge, croyant y trouver du plaisir, et il n’y rencontre que souffrance et amertume. Et qui donc l’y entraîne ? L’amour, son amour de l’indépendance ! Sur cette mer orageuse, il entend naviguer par ses propres bras en s’en fiant à sa pauvre science personnelle ; il ne veut pas se laisser porter par les bras de l’Ordre ni gouverner par son supérieur. Il est bien. de corps, dans la barque de la religion, mais son esprit est ailleurs. Il l’a désertée par le désir, en n’observant pas les règles et les coutumes de l’Ordre, et en violant les trois vœux qu’il s’est engagé à garder par sa profession religieuse. Le voilà sur cet océan des tempêtes. à la merci des vents contraires, rattaché à la barque par un morceau d’étoffe seulement,