Page:Catherine de Sienne - Le Dialogue, Hurtaud, 1913, II.djvu/308

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par l’habit qu’il porte, puisque son cœur en est absent. Ce n’est pas un religieux, mais un homme vêtu en religieux. Encore est-ce bien un homme ? N’est-ce pas plutôt un être à figure humaine, qui n’est pas vraiment homme, puisque, dans sa vie, il est pire qu’un animal ? Il ne se doute pas qu’il se donne beaucoup plus de peine, à vouloir ramer seul avec ses propres bras, qu’à naviguer avec ceux d’autrui. Il ne se rend pas compte, qu’il est en péril de mort éternelle ; il ne voit pas que, si ce morceau d’étoffe se détachait de la barque, aussitôt cet unique lien rompu par la mort, il n’y aurait plus pour lui de remède ! Non il ne voit rien ! La nuée de l’amour-propre, qui le conduit à la désobéissance, a éteint chez lui la lumière, et ne lui laisse plus apercevoir son malheur. O illusion ! et combien lamentable !

Quels fruits produira cet arbre mauvais, sinon des fruits de mort ? Est-ce que ses racines ne plongent pas dans l’orgueil. est-ce qu’il ne tire pas tout son suc de l’estime et de l’amour de soi-même ? Aussi, tout ce qui en sort, fleurs, feuilles, fruit, rameaux, tout y est gâté, tout y est corrompu. Les trois rameaux qu’il porte, obéissance, pauvreté, continence, ces trois rameaux sont pourris, par la sève empoisonnée que leur envoie le tronc lui-même, une affection mal placée et nourrie d’orgueil. Les feuilles, ce sont ces paroles malséantes et si libertines qu’on les trouverait déplacées, même dans la bouche d’un laïc débauché. A-t-il à annoncer mon Evangile, il s’applique à le faire, sans doute, en un langage distingué mais qui manque