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Page:Caylus - Souvenirs et correspondance.djvu/125

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et avoient des conversations si vives et si cordiales en apparence, que qui les auroit vues sans être au fait des intrigues de la cour, auroit cru qu’elles étoient les meilleures amies du monde.

Ces conversations rouloient sur les enfans du Roi, pour lesquels elles ont toujours agi de concert. L’habitude et le goût qu’elles avoient l’une et l’autre pour leur esprit faisoient aussi qu’elles avoient du plaisir à s’entretenir quand l’occasion s’en présentoit.

Je me souviens, à propos de ce goût indépendant de leurs procédés et de leurs mécontentemens, qu’elles se trouvèrent embarquées à faire un voyage de la cour dans le même carrosse, et, je crois, tête à tête. Madame de Montespan prit la parole, et dit, à madame de Maintenon : Ne soyons pas les dupes de cette affaire-ci ; causons comme si nous n’avions rien à démêler : bien entendu, ajouta-t-elle, que nous ne nous en aimerons pas davantage, et que nous reprendrons nos démêlés au retour. Madame de Maintenon accepta la proposition, et elles se tinrent parole en tout.

Le Roi, avant de nommer madame de Maintenon seconde dame d’atours de madame la Dauphine, eut la politesse, pour madame la maréchale de Rochefort, de lui demander si cette compagne ne lui feroit point de peine, en l’assurant en même temps qu’elle ne se mêleroit pas de la garde-robe.

La conduite de madame de Maintenon ne démentit pas ces assurances. Sa faveur occupoit tout son temps, et son caractère, encore plus que sa faveur, ne lui permettoit pas d’agir d’une autre manière.