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Page:Caylus - Souvenirs et correspondance.djvu/68

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tiroit du fouet. C’est là toute la controverse qu’on employa, et la seule abjuration que je fis[1].

M. de Châteaurenaud eut ordre d’envoyer mon frère à la cour. Il y arriva presque aussitôt que moi, et fit une plus longue résistance ; mais enfin il se rendit on le mit à l’académie[2], et il quitta la marine. Mon père, surpris et affligé au retour de sa campagne, écrivit à madame de Maintenon des lettres pleines d’amertume et de reproches, et l’accusa d’ingratitude à l’égard de sa mère, tante de madame de Maintenon, d’injustice et de dureté par rapport à lui ; mais, comme elle étoit soutenue de l’autorité du roi, il fallut céder à la force. On promit seulement, à

  1. Le 23 décembre 1680 madame de Maintenon écrivait à madame de Villette « Je l’amenai avec moi ; elle pleura un moment quand elle se vit seule dans mon carrosse ; ensuite elle se mit à chanter. Elle a dit à son frère qu’elle avoit pleuré en songeant que son père lui dit en partant que si elle changeoit de religion il ne la reverroit jamais. » Deux jours après elle lui expliquait ainsi pourquoi elle l’avait séparée de sa fille par ruse : « Si vous aviez été de la même religion que monsieur votre mari, je vous aurois priée de m’envoyer votre fille, et j’aurois espéré de vous autant de complaisance qu’en ont eu monsieur et madame de La Laigne et monsieur et madame de Caumont ; mais j’ai eu peur que l’on ne vous soupçonnât d’avoir été bien aise de me la donner, et de quelque intelligence avec moi sur la religion. Voilà, ma chère cousine, ce qui m’a obligé de vous tromper et pourvu que monsieur de Villette ne soit pas mécontent de vous, je me démêlerai bien du reste. J’espère qu’il ne prendra pas si sérieusement l’enlèvement de mademoiselle de Murçay et qu’il consentira qu’elle demeure avec moi jusqu’à ce qu’elle soit en âge de dire sa volonté, » (Lettre du 25 décembre.)
  2. Au dix-septième siècle on appelait académies des écoles dans lesquelles les jeunes gentilshommes apprenaient l’équitation, l’escrime, la danse, l’art militaire et quelquefois même l’histoire, la géographie et le blason.