Page:Cazalis - Le Livre du néant, 1872.djvu/88

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est une goutte de pluie. Quel plaisir peut-on trouver en ce monde ? »

Et, dans tout son enseignement, quelle profonde pitié pour toutes ces existences, « qui naissent de l’enchaînement fatal des causes et des effets ; » pour tous ces esclaves de l’erreur, pour tous ces malheureux condamnés à naître, à vieillir, à mourir, et à souffrir à travers cette forêt de douleurs tant de misères et d’inquiétudes !

Il sort de son palais, se promène dans un champ, et voit des vers ramper dans un sillon ; un crapaud vient qui les mange ; une vipère dévore le crapaud, un paon la vipère ; un faucon soudain saisit le paon et l’emporte ; un vautour se précipite sur le faucon, l’étreint et le déchire ; et le Bouddha médite tristement sur ces êtres forcés de se dévorer entre eux.

Une autre fois, il va vers une courtisane, vieillie, mutilée, les jambes et les bras coupés, et abandonnée sur une route. Il l’avait fuie et repoussée jadis, alors que, brillante et parée, dans l’éclat de sa beauté