Page:Chénier - Œuvres poétiques, édition Moland, 1889, volume 1.djvu/328

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Qu’aux rayons dont l’éclat ceint ta tête brillante,
Ils suivent dans les airs ta route étincelante,
Animent de leurs cris ton vol audacieux,
Et d’un œil étonné te perdent dans les cieux ;
Ou lorsque de l’amour, interprète fidèle,
Ta naïve Érato fait sourire une belle ;
Que son âme se peint dans ses regards touchants,
Et vole sur sa bouche au-devant de tes chants ;
Qu’elle interrompt ta voix, et d’une voix timide
S’informe de Fanny, d’Églé, d’Adélaïde,
Et vantant les honneurs qui suivent tes chansons,
Leur envie un amant qui fait vivre leurs noms ?


XXXIII[1]


 
Hier, en te quittant, enivré de tes charmes,
Belle D’…z…[2], vers moi, tenant en main des armes,
Une troupe d’enfants courut de toutes parts :
Ils portaient des flambeaux, des chaînes et des dards.
Leurs dards m’ont pénétré jusques au fond de l’âme,
Leurs flambeaux sur mon sein ont secoué la flamme,
Leurs chaînes m’ont saisi. D’une cruelle voix :
« Aimeras-tu D’…z… ? criaient-ils à la fois,
L’aimeras-tu toujours ? », Troupe auguste et suprême,
Ah ! vous le savez trop, dieux enfants, si je l’aime.
Mais qu’avez-vous besoin de chaînes et de traits ?

  1. Édition 1819.
  2. La premier éditeur avait mis partout Daphné. Voy. la note 1 de la page 125.