Page:Chénier - Œuvres poétiques, édition Moland, 1889, volume 2.djvu/151

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Chez eux peut-être aussi qu’une avare nature
N’a point voulu nourrir cette race parjure.
Le cacao sans doute et ses glands onctueux
Dédaignent d’habiter leurs bois infructueux.
Leur soleil ne sait point sur leurs arbres profanes
Mûrir le doux coco, les mielleuses bananes.
Leurs champs du beau maïs ignorent la moisson,
La mangue leur refuse une douce boisson.
D’herbages venimeux leurs terres sont couvertes.
Noires d’affreux poissons, leurs rivières désertes
N’offrent à leurs filets nulle proie ; et leurs traits
Ne trouvent point d’oiseau dans leurs sombres forêts[1].




Ce sera un épisode touchant que cette histoire que je voulais mettre dans un autre poème… Une jeune héroïne suit son amant… il est mort… Elle va sur son tombeau… on l’entraine… dans les délires de la fièvre… Enfin un jour elle éloigne tous ses gardiens… et mourante, languissante, elle marche vers ce tombeau… Avant d’y arriver… elle tombe… On l’entend, on y court… on veut la reporter chez elle… Elle s’attache aux branches d’un arbre en criant… On consent à la porter sur le tombeau… on obtient qu’elle mange… on lui donne du lait… Elle allait porter la coupe à sa bouche… elle s’arrête… réfléchit… des larmes coulent de ses yeux… elle incline la coupe sur le tombeau, verse la moitié du lait en disant : « Tiens, mange aussi, toi… » elle avale le reste… elle meurt sur le tombeau.

Il pourra être intéressant de représenter cette jeune Américaine qui fut amoureuse de Cortès, se plaisant à caresser le cheval du héros, à lui peigner la crinière, à lui présenter de la nourriture, et ne voulant pas le laisser soigner par…

  1. Ce morceau est dans l’édition de 1819.