Page:Chair molle.djvu/22

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charnues vernissées de rouge vif laissant voir la blancheur mate des dents larges et hautes, des yeux couleur de bronze s’enfonçant en des orbites bistrées ; les paupières brunies avec art, sont piquées de cils longs et espacés, et, entre elles, le nez droit, mince, aux narines nouvantes. Son corps moulé en un costume bleu offrit à Lucie l’ample saillie de la poitrine, très haute, puis une taille svelte assise sur des hanches peu développées et ces hanches s’amincissaient en deux longues jambes, montées sur des pieds petits et cambrés.

Sans flatterie, elle était charmante et pouvait se l’avouer. Dire qu’il allait falloir vendre tout cela ! Au moins, ils en auraient pour leur argent, les hommes ! Et c’était là, au milieu de ces meubles, qu’elle détaillerait son amour à tout venant.

La chambre avait un aspect bourgeois avec sa tapisserie grise à dessins bleuâtres, sa cheminée de marbre veiné. Sous globes, une pendule dorée à cadran de faïence, des flambeaux. Entre la cheminée et la fenêtre, la toilette ouverte montrait son miroir placé trop bas, une large cuvette pleine d’eau où baignait un pot de forme élancée. Le divan, les chaises étaient dépareillés, avaient des blancheurs d’usure aux coins des étoffes tendues depuis longtemps. Partout s’étalaient les mailles d’un ouvrage au crochet ; elles envahis-