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IV. Tannhäuser et Lohengrin


Ces deux œuvres, elles aussi, se trouvent étroitement liées par l’époque de leur conception première. Ce fut aussitôt après l’achèvement du Vaisseau Fantôme, à Paris, dans l’été de 1841, que les figures de Tannhäuser et de Lohengrin commencèrent à se dessiner dans l’imagination poétique du maître. Elles n’étaient pas nouvelles pour lui ; dès l’enfance il les avait connues ; et si, justement alors, elles se levèrent dans le champ de sa vision, et se mêlèrent désormais si intimement à la vie propre de son âme qu’en peu d’années il put les présenter au monde, dans deux impérissables chefs-d’œuvre, comme « des mythes inventés à nouveau sous une forme nouvelle », ce fut là, incontestablement, la manifestation d’un processus intérieur. Dans la partie biographique de ce livre nous avons vu déjà combien le séjour à l’étranger développa, chez Wagner, le désir du sol natal, de tout ce qui est allemand. Ce n’est point le hasard qui mit dans ses mains de vieux livres de légendes, mais bien le même mobile artistique qui lui avait fait choisir le sujet du Vaisseau-Fantôme, et qui le détermina « à se détourner désormais du domaine de l’histoire, pour ne plus choisir ses sujets que dans celui de la légende ». Un fait montre bien le peu de valeur des mobiles extérieurs, pour l’artiste qui cède à l’impulsion créatrice intérieure et fatale ; c’est que Wagner, dont l’étonnante mémoire ne s’affaiblit jamais avec l’âge, dit de son Tannhäuser des choses que nos germanistes ne peuvent expliquer pourtant que par une erreur de sa mémoire. En effet, il dit dans sa Communication, en 1851, que c’est le Volksbuch consacré