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Page:Chambon - Notes sur Prosper Mérimée, 1902.djvu/228

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202 NOTES SUR PROSPER MÉRIMÉE

tation du faubourg S 1 Palaye, qui vient réclamer contre mes arrêts et me demander une passerelle. J'aurais pu vous amener, ajoute-t-il tous les habitants, les femmes et les petits enfants, mais c'eût été une inconvenance, et j'en suis incapable. Après cet exorde il commença sa harangue dont je vous fais grâce. En substance, il prétend que le faubourg est ruiné s'il n'a pas la passerelle, et me prie de mettre 4.000 tant pères que mères de famille aux pieds de M. Duchâtel. Entre chaque alinéa de sa harangue, un gros homme décoré à figure de carlin, grognait d'une voix sourde : J'ai perdu 30.000 francs! et 20 autres voix répondaient : Et moi donc!

« Acculé dans mon coin, j'ai commencé par leur dire que je n'avais pas mission pour les écouter, et que je n'étais à Saintes que pour une question d'art, sur laquelle je serais enchanté d'avoir leur avis, mais que je faisais profession de conserver les vieux monumens et non d'en faire de neufs. Puis je leur ai fait une belle parabole pour leur prouver que tous les quartiers de Saintes ne pou- vaient prospérer à la fois. Ils l'ont comprise, mais en déclarant qu'ils voudraient que ce fût le quartier de S* Palaie qui prospérât. — J'ai perdu 30.000 fr., etc. Un teinturier que j'ai reconnu à ses mains glauques, s'est alors emporté contre l'arc, mais ses collègues l'ont fait taire aussitôt, et ont protesté qu'ils vénéraient les monu- mens historiques; un petit homme en levant les yeux au ciel a ajouté d'un ton pénétré : Quand on a descendu l'arc, j'ai versé des larmes d'indignité !

« Conclusion, voici ce qu'ils demandent : « i° Permission de bâtir la passerelle devant l'arc. — Réponse : Jamais je ne donnerai un avis favorable à cette