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Page:Chambon - Notes sur Prosper Mérimée, 1902.djvu/399

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VOYAGES EN ANGLETERRE 573

fique et je suis seulement fâché que vous vous soyez privé pour moi de ce phénomène qui tiendrait bien sa place à côté du jonc tigré du passage Yivienne. Lorsque je serai en fonds, j'achèterai un bouquin digne du tuyau, s'il s'en trouve.

« Je reviens d'Angleterre où j'ai passé deux mois. J'ai eu la chance d'entendre le dernier discours de lord John Russell à la chambre des communes dans lequel il nous menace de toute sa colère si nous prenons la Sardaigne. Je lui ai dit que nous avions mieux à prendre. La jalousie et l'inquiétude des Anglais est amusante. Ils sont servis par leurs espions, comme on l'est toujours; c'est- à-dire que neuf fois sur dix on leur conte des bêtises, parce qu'un espion qui ne dit rien n'est pas payé et que pour vivre il est obligé souvent d'inventer. Comme les Anglais, sont de tous les peuples, le mieux doué sous le rapport de l'imagination, ils gobent toutes les bourdes et en font des commentaires à perte de vue. Ce serait une chose curieuse à calculer que l'argent qu'ils dépensent lorsqu'on leur a annoncé que l'empereur fait faire l'essai d'un canon ou d'un bateau. Il faut qu'ils aient aussitôt leur contre-canon et leur contre-vaisseau. L'in- vention des volontaires si elle dure pourra avoir des con- séquences. A mon avis ce sera un très grand pas que fera la démocratie en Angleterre, où elle en a déjà fait beaucoup. Ici tout va tout doucement et gentiment. Il y a moins de chances de guerre ' que jamais, et de révolu-

1. La lettre sans date, inédite, suivante qui se trouve à la Bibliothèque de Nantes, Collection Labouchcre, 672, n" 241, est probablement de la même année : « Cannes, 7 décembre. — Monsieur, J'avais oublié notre pari que vous me rappeliez. Il s'agissait, je crois de paix et de guerre, et