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trai en Afrique par l’isthme de Suez, et je parcourus en différents sens ce continent, dont chaque partie excitait ma curiosité. Passant en revue les antiques monuments de l’Égypte, j’aperçus près de Thèbes aux cent portes les grottes du désert qu’habitèrent autrefois de pieux solitaires, et je me dis aussitôt : « Ici sera ma demeure. » Je choisis pour ma future habitation l’une des plus retirées, qui était à la fois spacieuse, commode et inaccessible aux chacals, et je poursuivis ma course. J’entrai en Europe par les colonnes d’Hercule, et, après en avoir regardé les diverses provinces, je passai du nord de l’Asie sur les glaces polaires, et gagnai le Groënland et l’Amérique. Je parcourus les deux parties du nouveau monde, et l’hiver qui régnait dans le sud me fit promptement retourner du cap Horn vers les tropiques.

Je m’arrêtai jusqu’à ce que le jour se levât sur l’orient de l’Asie, et repris ma course après quelque repos. Je suivis du sud au nord des deux Amériques la haute chaîne de montagnes qui en forme l’arête. Je marchais avec précaution, d’un sommet à un autre, sur des glaces éternelles et au milieu des feux que vomissaient les volcans ; souvent j’avais peine à respirer. Je cherchai le détroit de Behring et repassai en Asie. J’en suivis la côte orientale dans toutes ses sinuosités, examinant avec attention quelles seraient celles des îles voisines qui pourraient m’être accessibles.

De la presqu’île de Malacca mes bottes me portèrent sur les îles jusqu’à celle de Lamboc.