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fient Deus effundens, ou Deus effusus, selon que nous lirons Noute-Phon ou Noute-Phên, en suppléant la voyelle omise, comme à l’ordinaire, dans la transcription hiéroglyphique de ces mots. Quoi qu’il en soit, l’une et l’autre de ces qualifications conviennent parfaitement à Chnouphis considéré soit comme l’auteur du Nil, soit comme le Nil lui-même.

Le sens de cette légende est d’ailleurs, pour ainsi dire, développé et expliqué par l’image de Cnouphis-Nilus, reproduite sur notre 1re planche 3 ter, d’après les peintures d’une superbe momie appartenant à M. Durand. Le dieu du Nil est assis sur un trône ; sa tête est surmontée de cornes de Bouc, et il tient dans sa main un grand vase d’où sortent deux filets d’eau ; l’un est recueilli par un Égyptien agenouillé qui s’en abreuve, l’autre tombe sur des fleurs et des fruits placés sur un autel. C’est le même vase que, selon Eusèbe, les Égyptiens plaçaient à côté des images de Cnouphis[1], et que nous retrouvons, en effet, parmi les attributs de ce dieu, sur une foule de monuments : c’est aussi un vase que les Égyptiens ont constamment employé pour écrire en hiéroglyphes phonétiques, les divers noms de Cnouphis[2].

Planche 3 ter

Les grands monuments de l’Égypte nous offrent aussi habituellement, parmi les attributs qui accompagnent les images, soit figuratives, soit symboliques d’Ammon-Cnouphis, trois grands vases portés sur de petites constructions en bois, encore en usage dans le pays. Nous citerons, à ce sujet, des bas-reliefs copiés par la Commission d’Égypte dans les appartements de granit du palais de Carnac[3] ; dans deux d’entre eux, les trois vases sont placés à côté de l’Arche symbolique du dieu, recouverte d’un voile, mais reconnaissable aux têtes de bélier surmontées de l’uræus dressé, qui décorent la poupe et la proue du vaisseau ou Bari sacrée ; sur un troisième bas-relief, ces vases sont reproduits dans la légende hiéroglyphique de l’Arche ; légende qui, comme celle des deux autres, commence par le nom divin d’Amon ou d’Amon-Ra, appellation et forme primordiales de Cnouphis. Ces trois vases, surmontés de tiges et de fleurs de lotus, sont également placés à côté de l’Arche de Cnouphis dans le principal bas-relief du temple de ce dieu à Éléphantine[4], monument élevé sous le règne du pharaon Aménophis II, de la XVIIIe dynastie. (Voyez 1re pl. 3 ter, lég. no 2.)

  1. Eusèbe, Préparat. évangéliq., liv. III, chap. 12.
  2. Voyez suprà, planche 3.
  3. Descript. de l’Égypte, Antiqu., vol. II, pl. 34, no 1.
  4. Idem, v. I, pl. 37, no 2.