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JEAN TALON, INTENDANT

tume de passer en ce pays pour le transport des marchandises de France, mais même aux propres habitants du Canada, jusqu’à leur disputer le droit de faire venir pour leur compte des denrées du royaume, desquelles ils se servent tant pour leur subsistance que pour faire la traite avec les sauvages, qui seule arrêterait ce qu’il y a de plus considérable entre les habitants, qui pour y demeurer avec leurs familles ne trouvent pas assez de charmes en la seule culture de la terre[1]. Enfin je reconnais très bien que la compagnie continuant de pousser son établissement jusqu’où elle le prétend porter, profitera sans doute beaucoup en dégraissant le pays, et non seulement elle lui ôtera les moyens de se soutenir, mais encore elle fera un obstacle essentiel à son établissement et dans dix ans il sera moins peuplé qu’il ne l’est aujourd’hui. On a mis la compagnie en possession non seulement des droits honorifiques et de seigneurie, mais encore de tous ceux qui rendent quelque utilité. Quant au commerce j’appréhende qu’elle ne le fasse dans une trop grande étendue. Elle s’autorise pour cela des termes de sa concession qui le lui donne privativement à tous autres, et je crains que par là elle fasse perdre cœur à la plus nombreuse et considérable partie des habitants du Canada. Comme sa prétention et les ordres que le roi m’a donnés pour mon instruction, par lesquels Sa Majesté me commande d’exciter les dits habitants au commerce, ne s’accordent pas trop, je tiendrai tant que je pourrai les choses en balance pour nourrir quelqu’espérance de lucre et de profit dans les

  1. — Le sens de cette phrase n’est pas complet ; il y a eu ici une erreur du copiste.