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JEAN TALON, INTENDANT

faisait une grande dépense pour s’acquérir des amis, mais aussi il n’y avait point de marchands après que la compagnie eut quitté qui purent faire des affaires en sa présence. Ses marchandises lui revenaient quittes de droits, de fret et d’assurances. Il refusa aussi de payer l’entrée au pays des vins, des eaux-de-vie et du tabac. Enfin ses amis et ennemis lui disaient tout haut que c’était des profits de son commerce que le roi serait enrichi. Ils se brouillèrent, M. de Courcelle et lui. Leur mésintelligence força le premier de demander son congé. M. de Frontenac venu en sa place se plaignit aussi de lui[1], et je crois qu’il repassa en France sans congé[2], d’où il n’est plus retourné quoiqu’il l’eût promis à ses amis[3]. »

Nous avons entendu l’accusation, écoutons maintenant la réponse. Les plaintes dont M. de la Chesnaye se faisait l’écho en 1676, étaient venues aux oreilles de Talon dès 1670 ; et voici ce qu’il écrivait au ministre : « Je dois faire observer que si l’on transportait ici tout l’argent que le roi ordonne pour le Canada, et qu’on s’en servit en espèces, non seulement on n’accommoderait pas ce pays, mais on dépenserait le double. Cette pratique à convertir l’argent du roi en denrées propres à la nourriture ou vêtements, fournitures d’ustensiles, et aux établissements des soldats, des filles qui se marient, et des nouvelles familles qui passent ici n’est pas agréable aux marchands qui voudraient que tout se prît chez eux, bon ou mauvais, et à si haut prix qu’il

  1. — Nous verrons cela dans un prochain chapitre.
  2. — Ceci était inexact.
  3. Mémoire de M. de la Chesnaye sur le Canada, 1676 ; Collection de manuscrits, I, p. 252.