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xiv
INTRODUCTION

Mais qu’est-ce que le bronze ou le granit pourrait ajouter à la réputation littéraire de ce grand patriote ?

Le piédestal qu’il s’est dressé de sa propre main en écrivant le Drapeau de Carillon, Un soldat de l’Empire, Castelfidardo, les Morts, les Mille-Îles, etc, ne proclame-t-il pas plus hautement sa gloire que toutes les colonnes et toutes les statues qu’on pourrait lui élever ?

L’homme qui a au front l’auréole du génie n’a pas besoin d’un socle de pierre pour se grandir ; et si l’on élevait un monument à Crémazie, un tel acte de justice et de reconnaissance grandirait plus la patrie que le chantre de ses héros.

Non, il n’est pas besoin d’un monument pour exalter et perpétuer la mémoire de Crémazie, et, malgré la distance qui sépare la nouvelle France de l’ancienne, où ses restes reposeront à jamais, malgré la profonde solitude qui pèse sur sa tombe destinée peut-être à disparaître bientôt, le nom de ce poète brillera sans cesse d’un éclat souverain dans notre panthéon littéraire, et ses malheurs attendriront toujours le cœur des vrais amants de l’art.

Et aussi longtemps que la langue française sera parlée sur la terre d’Amérique, Crémazie sera considéré comme le père de notre littérature, et sera pour le Canada ce que Dante et le Tasse sont encore pour l’Italie, Homère et Virgile pour l’humanité.

Au nom de Crémazie je pourrais ajouter ceux d’une cinquantaine de prosateurs et poètes dont les œuvres sont tout à fait remarquables, et démontrent