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les aspirations


Souvent l’homme a serré la bête d’assez près
Pour la tirer parmi des branchages épais
Dont l’enchevêtrement embarrassait sa fuite,
Que l’épouvante aveugle en tous sens précipite ;
Mais un rien, un faux pas, un glaçon, le grésil,
L’a toujours empêché d’épauler son fusil.

Le grand cerf fuit aussi rapide que la trombe,
Aveuglé par la course et la neige qui tombe,
Hors d’haleine, au hasard, comme privé d’instinct,
Mais pour l’âpre chasseur toujours aussi lointain.
L’animal, fou de peur, l’homme, fou de courage,
Volent, comme portés par le vent qui fait rage,
Aux ramures parfois se déchirant la chair
Et laissant derrière eux un brouillard chaud dans l’air.

Et celui qui peut voir cette course affolée
À travers la savane aride et désolée,
Dans l’ombre, dans la neige et le vent aboyant,
Croit parfois assister au passage effrayant
De deux fantômes nés du vertige et du songe.