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et guerres. Et pour leur ébattement ils leur tiraient desdits canons sus le mufle toute l’éternité.

À côté des autruches, singes et aigles, se dressait, balançait et tordait grand serpent ayant pelage d’ours ; il était long et gros outre toute mesure, et agitait cent mille bras velus tenant chacun une hallebarde de fer aiguisé comme rasoir. On le nommait le serpent des Espagnes pour ce qu’ès enfers il taillait de ses hallebardes sans merci toutes les troupes des traîtres pillards qui gâtèrent nos pays.

Se gardant dudit serpent avec grande prudence, voltigeaient malicieux petits pourceaux ailés desquels la queue était andouille. Ladite queue était réservée à la rage éternelle du gourmand qui tombait ès enfers. Car le pourceau venait à lui, lui mettait l’andouille au bec, il y voulait mordre, mais soudain le pourceau s’envolait, et ainsi durant toute l’éternité.

Là furent vus aussi, se pavanant dans leurs plumes mirifiques, paons monstrueux. Aussitôt que quelque maître fat et vaniteux venait en leur logis, se rengorgeant dans ses beaux atours, le paon allait à lui et, ouvrant la queue, le semblait inviter à tirer quelque belle plume pour en orner son couvre-chef ; mais sitôt que le fat approchait cuidant tirer la plume, voilà Monsieur du Paon de lui lâcher en pleine face