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jouant mille beaux instruments, se tenaient les femmes des diables. Celles-là servaient à châtier les vieux paillards, corrupteurs de jeunesse ; lesquels voyant venir elles appelaient bien amoureusement, mais ils ne pouvaient oncques d’elles approcher. Toute l’éternité les pauvres paillards les devaient considérer sans leur pouvoir seulement toucher le bout de l’ongle du petit doigt. Et ils plouraient et se lamentaient, mais en vain, et ainsi durant les siècles des siècles.

Là étaient aussi malicieux petits diables battant tambours, faits de la peau des hypocrites desquels le masque tombait sus la caisse en façon d’ornement. Et il fallait auxdits hypocrites, sans peau, sans masque, dans toute leur laideur, honnis, hués, sifflés, conspués, mangés d’horribles mouches et suivis des diables battant tambours, vaguer par l’enfer durant toute l’éternité.

Il était bon de voir aussi là les diables des présomptueux. C’étaient grasses et belles outres pleines de vent, finissant en bec, au bout duquel était un chalumeau. Lesdites outres avaient pieds d’aigle et deux bons petits bras, terminés par des mains dont les doigts étaient longs assez pour pouvoir enceindre l’outre entière. Quand le présomptueux entrait ès enfers disant : « Je suis grand, je suis beau, fort, puissant, victorieux, je vaincrai Lucifer et épouserai sa femelle Astarté, » les