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le peuple du pôle

— Les emporter… Où donc les emporter ? demanda-t-il.

— Mais… dans le ballon. Qu’est-ce que cette idée a d’extraordinaire ?

Il secoua la tête, fit un geste vague et, d’une voix étrange :

— On ne peut pas empêcher ce qui a été d’être encore, murmura-t-il comme en s’adressant à lui-même… Ce qui a été se cache, mais existe encore quelque part… Et quelquefois on le rencontre, on le trouve… Mais alors c’est que soi-même on a été, et on ne peut plus revenir vers ce qui est ; car ce qui est ne communique pas avec ce qui a été… ou bien c’est si loin, si loin qu’il faudrait des siècles, des siècles, plus que des siècles pour en revenir…

— Qu’est-ce que tu racontes ? interrompis-je avec anxiété.

Il tressaillit ; puis ses yeux perdirent leur fixité nébuleuse ; il se redressa, se ressaisit et me dit en affectant de rire :

— Ce que je racontais ? Des choses qui chantaient dans ma tête, des bêtises !… Mais ne nous éternisons pas là-dessous.

Je pensai qu’il avait voulu se rendre intéressant, ou se moquer de moi, et je ne jugeai pas utile d’insister. Après avoir vainement cherché