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le peuple du pôle

qu’il eut commandé chez un tapissier des kilomètres et des kilomètres de tentures noires pour orner l’Arc de Triomphe à l’occasion de son propre enterrement que sa famille prit le parti de me le confier… À présent, il a complètement oublié tout souci de gloire poétique ; il affirme qu’il est un explorateur encore dans l’exercice de ses fonctions. Il croit s’évader à son gré de « la prison où le retiennent ses ennemis » et circuler à travers le monde d’une manière analogue à celle dont vont et viennent les mots sur les fils télégraphiques ; — il veut même faire breveter ce nouveau moyen de locomotion ; — et, toutes les semaines, je reçois un récit de ses voyages… Voilà un garçon qui, de puis l’âge de quinze ans, n’a guère dû étudier la géographie, préoccupé qu’il était de remplir les revues de ses productions, de se recommander à des critiques, et d’implorer, dans les derniers temps, des décorations, avec menaces aux ministres de ne plus écrire un vers si on les lui refusait… Eh bien, il n’en déploie pas moins sur l’aspect, les habitants et les mœurs de contrées dont le nom même ne vous dirait rien, des connaissances à rendre jaloux un spécialiste !… Il ne me reste plus qu’à m’excuser d’avoir si longtemps gardé la parole. Le fait que je vous rapporte a du moins l’avantage de me paraître assez significatif pour me dispen-