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Page:Charles d Orléans - Poésies complètes, Flammarion, 1915.djvu/114

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Que, Dieu mercy, j’ay loyalle maistresse,
Qui de tous biens a trop plus qu’à largesse.
Et si pense que, la sienne mercy,
Elle me tient son servant et amy ;
Ne doy je bien doncques joye mener
Et me tenir en joyeuse plaisance ?
Certes oüil, et Amour mercier
Treshumblement de toute ma puissance.
     Mais d’autre part, il me convient souffrir
Tant de douleur et de dure destresse
Par Fortune, qui me vient assaillir
De tous costez, qui de maulx est princesse !
Passer m’a fait le plus de ma jeunesse,
Dieu scet comment, en doloreux party ;
Et si me fait demourer en soussy,
Loings de celle par qui puis recouvrer
Le vray trésor de ma droitte espérance.
Et que je vueil obéir et amer
Treshumblement de toute ma puissance.
     Et pource, May, je vous viens requerir,
Pardonnez moy de vostre gentillesse,
Se je ne puis apresent vous servir
Comme je doy, car je vous fais promesse,
J’ay bon vouloir envers vous, mais Tristesse
M’a si long temps en son dangier nourry
Que j’ay du tout Joye mis en oubly ;
Si me vault mieulx seul de gens eslongier ;
Qui dolent est ne sert que d’encombrance.
Pource, reclus me tendray en penser
Treshumblement de toute ma puissance.


ENVOI

     Doulx Souvenir, chierement je vous pry,
Escrivez tost ceste balade cy ;