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POÈME DE LA PRISON.

ENVOI

     Aveugle suy, ne sçay où aler doye ;
De mon baston, affin que ne forvoye,
Je vois tastant mon chemin çà et là ;
C’est grant pitié qu’il convient que je soye
L’omme esgaré qui ne scet où il va.


BALLADE LXIV.


     J’ay esté de la compaignie
Des amoureux moult longuement,
Et m’a Amour, dont le mercie,
Donné de ses biens largement ;
Mais au derrain, ne sçay comment,
Mon fait est venu au contraire ;
Et, à parler ouvertement,
Tout est rompu, c’est à refaire.
     Certes, je ne cuidoye mie
Qu’en amer eust tel changement ;
Car chascun dit que c’est la vie
Où il a plus d’esbatement ;
Helas ! j’ay trouvé autrement ;
Car, quant en l’amoureux repaire
Cuidoye vivre seurement,
Tout est rompu, c’est à reffaire
     Au fort, en Amour je m’affie
Qui m’aidera aucunement,
Pour l’amour de sa seigneurie
Que j’ay servie loyaument ;
N’oncques ne fis, par mon serment,
Chose qui lui doye desplaire,