Page:Charles d Orléans - Poésies complètes, Flammarion, 1915.djvu/245

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Et aussi il ne vous desplaise,
D’une question qu’ay cy mise,
D’un mien amy très en malaise.
Dont, Monseigneur (mais qu’il vous plaise),
Vostre conseil avoir m’en fault ;
L’advis de deux mieulx que d’un vault.
     Cellui que dy est si espris
D’une tant belle, bonne Dame,
Qu’il ne pourrait estre repris
Tellement si tresfort il âme ;
Mais espoir n’a point, sur mon âme,
D’avoir jamais d’elle secours ;
Pas n’est en paix qui sert amours.
     Que autre Dame, se lui semble,
Qui n’a point de meilleur vivant,
Par le bien qu’en elle s’assemble,
Le vouldroit bien pour son servant ;
Non pourtant il mourrait avant
Que son cueur se peust sien clamer ;
Par force l’en ne peut amer.
     Et pource, maintenant demande
Qui lui sera moins chose forte,
Celle amer qu’Amours lui commande,
Où toute s’esperance est morte,
Ou l’autre, combien qu’il rapporte
Qu’amer ne la peut, ne désire ?
De deulx maulx on prent le moins pire.
     Veez là de mon amy le cas,
Auquel fauldroye bien envis ;
Mais conseiller ne le puis pas,
Sans en avoir de vous l’advis.
Fait en soit à votre devis,
Monseigneur, car c’est bien raison,
Et à tant fine ma raison.