Page:Charles d Orléans - Poésies complètes, Flammarion, 1915.djvu/31

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très-inhumaine mort de feu nostre très redoubté seigneur et père » et pour « reparer l’onneur de monseigneur le roy qui, en ce, a esté tant blecié, etc. » L’argent et les soldats étant prêts, il songeait à l’opinion publique, et dès le commencement de cette année il écrit aux bonnes villes, à l’Université, au roi, car tout prouvait que l’accord fait pendant ce séjour à Bicétre, dont nous avons parlé, serait vain. Ces lettres sont énergiques et claires. La dernière, qui fut écrite au roi, de Jargeau, 14 juillet, est fort belle. On l’a attribuée, sans grande raison, à Jean Gerson. Charles d’Orléans ne devait pas sans doute être étranger à ces combats de plume. Le 18 juillet partaient les lettres de défi des fils d’Orléans à Jean de Bourgogne. La guerre est commencée. C’est le roi, on le sait, qui accepta le gant. Il proclama la forfaiture des Orléanais, conrisqua le comté de Soissons, réunit au bailliage de Senlis les comtés de Valois, Beaumont, etc. Pendant ce temps, ou plutôt avant ce temps, le duc d’Orléans était venu assiéger Paris. De sa personne, il logeait tantôt à Saint-Ouen, tantôt à Saint-Denis. C’est à cette époque que se place ce fait raconté par la Chronique bourguignonne de la bibliothèque de Lille. Les Armagnacs en arrivant à Saint Denis, dit-elle, forcèrent les coffres où se trouvaient les joyaux de la reine et, parmi eux, une couronne, « laquelle le comte d’Armagnac l’assist sur la teste du duc d’Orléans et lui dit : « Monseigneur, pour sauver mon serment, je vous fais roi de France, quoique vous n’en possédiez pas la terre. Mais cette possession, je vous la donnerai avant de retourner en ma seigneurie, et je vous ferai couronner à Reims. « Le bruit courait, en effet, et le Religieux de Saint-Denis le confirme, que l’on voulait le faire roi de France, et un chevalier picard, Vivet d’Espineuse, l’avait affirmé en ajoutant que ses adhérents voulaient se partager la France. Ce projet a bien pu traverser l’esprit ambitieux de Bernard d’Armagnac. Mais la haine du Parisien contre les Armagnacs était bien niaisement crédule, la Chronique lilloise est bien lourdement, partialement et grossièrement Hamande, et Vivet d’Espineuse fut fort aidé par la torture dans ses révélations. Le 9 octobre, vingt-huit des plus nobles chevaliers de l’armée orléanaise démentaient ces bruits avec indignation.

Dans ce canevas que nous donnons de la vie de