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vendus par lui aux marchands de Londres, nous devons croire aussi qu’il se préoccupait de cette bibliothèque, de ce riche mobilier rassemblés au château de Blois par son père. Ce fut, sans doute, par ses ordres spéciaux qu’en 1427, on dressa le catalogue — que nous avons encore — de cette bibliothèque, et qu’on la transporta liors du voisinage des Anglais, de Blois à Saumur.

Mais comment lui furent racontés cette vaillante épopée du siége d’Orléans, et cette miraculeuse Iliade de Jeanne d’Arc ?

Pourtant parmi les traits touchants de ce cœur héroïque de Jeanne, qui représente, au milieu d’une lumière surnaturelle, la plus noble, la plus clairvoyante partie du cœur de la France, je trouve sa tendresse naïve pour le pauvre duc d’Orléans. Au fond c’était son parti qui défendait la nationalité française, et Jeanne avait pitié de sa ville comme de la patrie, et elle s’était attachée à lui comme au gentil Dauphin. C’est à lui qu’elle songeait en faisant des prisonniers, lui qu’elle voulait aller bravement délivrer après avoir délivré la France. Elle le délivra réellement. Non-seulement elle écrasa la puissance anglaise, mais il ne paraît pas douteux que ses prédictions excitèrent le zèle de celle qui fut surtout sa libératrice, je veux dire la duchesse de Bourgogne.

Le siége d’Orléans lui porta de toute façon bonheur. En 1427, il avait fait, avec le gouvernement anglais, un traité qui donnait à ses terres protection et exemption de guerre. Les Anglais l’oublièrent quand leur intérêt leur montra les inconvénients de cette promesse. Nous pouvons nous rendre difficilement compte de l’horreur que souleva ce procédé, non parce qu’il violait ertrontément un traité — chose vulgaire — mais parce qu’il affrontait audacieusement i’opinion. publique. La chevalerie avait tendu à protéger à titre drphelin la terre prisée de son seigneur vaillamment tombé dans la bataille. Aussi ce fut un cri général quand on apprit le siège d’Orléans, cri dont l’écho nous est précieusement conservé, dans toutes les Chroniques. On peut même conclure des paroles du pape Pie II que ce fut un des traits qui dévoilèrent le mieux, aux yeux de la chrétienté, le caractère insolemment et vilainement brutal de la politique anglaise. Le principe des nationalités n’était pas encore