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Page:Charles d Orléans - Poésies complètes, Flammarion, 1915.djvu/45

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la liberté à toute force. C’est dans ce désespoir, dans les conséquences intellectuelles et morales d’une telle situation, dans ces vingt-cinq années d’une telle servitude qu’on trouve l’explication de l’acte humiliant et inutile de 1433. Il ignorait le véritable état des affaires de France. De plus la loi Salique, on le sait maintenant, n’avait pas alors cette grande autorité qu’elle acquit par la suite. La légitimité de Charles VII avait été fortement mise en question. Henri VI d’Angleterre, petit-fils de Charles VI, reconnu comme héritier de la couronne de France par un consentement dont on avait dû exagérer la généralité, et par une assemblée que les Anglais aimaient à faire passer pour les États généraux, avait des apparences de roi de France tout autant que d’Angleterre. Ces usages, ces lois, ces préjugés de la féodalité auxquels l’ai fait mainte lois allusion, ne donnaient pas à Charles sur le patriotisme les idées que nous avons aujourd’hui. Ces raisons me portent à croire que ses contemporains, meilleurs juges de la situation historique, ne le jugèrent pas aussi sévèrement que nous avons le droit de le faire au nom de la morale.

Nous pourrions donner ici la liste des demandes que Jean Hardouin lui apporta à Londres, au nom de ses sujets, aux Pâques de 1437 ; ce nous serait un spécimen des affaires courantes qu’il avait à traiter pendant sa captivité, en dehors des grandes questions de politique générale. Mais j’ai hâte d’arriver à ce douzième jour de novembre où il se trouve à Gravelines et absolument libre. Il l’était en fait depuis le 3 du même mois. Mais ce 12, il avait encore à prêter un millième et dernier serment de reconnaissance et de tendresse au roi d’Angleterre.


IV.

Je voudrais pouvoir donner le texte de la convention écrite en latin le 2 juillet 1440 à Windsor. J’y rencontre une ampleur de style, une aisance de dignité, une sincérité de tristesse et un développement de sentiments personnels qui me font attribuer ce document à Charles lui même. Après avoir déploré l’état de