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Page:Charles d Orléans - Poésies complètes, Flammarion, 1915.djvu/566

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exagérer la valeur, et il s’est laissé aller fort doucement sur cette pente. Il affirme d’un ton magistral que c’est de beaucoup le plus important, et il traite dédaigneusement et légèrement tous les autres en les appelant des manuscrits de seconde main.

Ce document a évidemment une grande valeur, on peut la constater sans y mettre le ton enthousiaste et impérieux de M. Champollion.

Il contient les poésies latines d’un lettré italien, Antoine Astezan, ou L’Astezan, c’est-à-dire d’Asti en Piémont. Ce personnage et les relations que Charles d’Orléans avait avec Asti nous sont connus par la préface. Nous savons qu’à Villeneuve, dans ce comté d’Ast, pendant le voyage qu’y fit le duc en 1448-1449, Antoine Astezan vint faire sa cour à son prince, de cette façon humble et quémanderesse que Marot et du Bellay n’allaient pas tarder à stigmatiser comme une habitude italienne. À cette date, le savant Italien ignorait complètement le talent poétique de son futur maître, les discours qu’il prononça nous en donnent la preuve. Il obtint de Charles la place de premier secrétaire. Il le vint rejoindre en France en 1450. Il le quitta en 1453, emportant les poésies du prince en Italie pour les traduire en latin. C’est cette traduction avec texte en regard et autres poésies latines d’Aztezan que renferme le manuscrit de Grenoble.

Il ne contient donc que les poésies antérieures à cette date de 1453. Il n’a pas été écrit sous les yeux de Charles, ni classé d’après son inspiration. S’il a été achevé du vivant du prince, — ce qui est possible, — il ne le fut pas avant 1461, et Astezan était depuis 1453 en Italie. Il n’a donc que la valeur qu’a pu lui donner Astezan, un Italien, ce qui enlève quelque autorité à son système orthographique ; un Italien qui resta quelque temps auprès de notre duc et qui espérait sans doute que son travail passerait sous les regards de son maître, mais qui arrange les poésies de l’auteur en vue de la traduction latine, en vue d’une traduction destinée surtout à faire valoir les