qui s’y passe , surtout n’ayant eu aucune nouvelle de France depuis mon départ, que la lettre que j’ai reçue de Blancey à Marseille ; ainsi , mes chers amis , je vous charge bien fort l’un et l’autre de veiller à ce que les gens de ma connaissance m’écrivent souvent et avec grand détail.
LETTRE XIV
Un bruit assez étrange est venu jusqu’à moi.
Seigneur……
On prétendoit tout communément dans Venise que
mon journal ci-présent, ouvrage si respectable, n’avoit
servi, en arrivant vers vous, qu’à égayer votre veine
et celle de vos compatriotes, de fort méchants propos ;
que vous vous étiez émancipés à lâcher certains traits de
satire contre un travail aussi distingué par l’utilité des
choses qu’il contient, que par la précision et la brièveté
qui y régnent, et que, non contents d’avoir les uns et les
autres épuisé votre petite ironie sur des écrits qui, à la
matière et au style près, sont, à coup sûr, irrépréhensibles, vous aviez mêlé M. Loppin dans vos railleries ;
chose que je ne pourrois, ne voudrois, ni ne devrois
tolérer. Il est vrai que ce n’est pas un mauvais plaisant,
ni un freluquet comme vos petits messieurs ; mais en
récompense c’est un esprit sensé, un caractère droit, un
bon cœur, des vues justes : c’est l’homme qui fait face
pour nous lorsqu’il est question de doctrine. En un mot,
c’est une tête carrée, dont nous ferions bien de suivre les
avis. Ainsi, sur le bruit qui couroit de ce que dessus,
j’allois sans doute me gendarmer bien fort ; mais à la
vue de votre lettre,
Seigneur, je l’ai jugé trop peu digne de foi.