général de l’Étal se trouvoit joint à son sentiment ? Ce qui rend ces Lorrains de mauvaise humeur contre le traité de Vienne, c’est l’échange de la Lorraine contre la Toscane. Le troc est néanmoins fort avantageux pour leur maître. On a beau alléguer l’affection à l’héritage patrimonial, quelques-millions de plus mis dans la balance y font un suffisant contre-poids.
Le prince d’Elbœuf, qui tient ici rang de premier prince du sang, tâche autant qu’il peut, par ses manières polies, de réparer les mauvaises manières des Lorrains dont il est le premier à convenir. Il joue à merveille le bon homme et l’affable ; et ce que j’y trouve le mieux, il nous fait très-bonne chère, sans aucune façon qui sente le prince. Vous connaissez la politesse innée des princes de la maison de Lorraine ; vous connaissez aussi de réputation celui dont je vous parle ici, c’est le même qui a été marié à Naples, et qui a fait en Europe tant de diverses sortes de figures, et… que je lui pardonne, tant qu’il me donnera du vin de Tokai de la cave du Grand-Duc. La princesse de Craon tient aussi une fort bonne maison et fort commode pour les étrangers. C’est une femme qui me plaît beaucoup par son air et ses manières ; et, quoiqu’elle soit grand’mère d’ancienne date, en vérité je crois qu’en cas de besoin, je ferois bien encore avec elle le petit duc de Lorraine. Son mari tient ici un grand état, ainsi que le marquis du Châtelet gouverneur de la ville. Tous ceux-ci ne sont point compris dans la haine jurée à leurs compatriotes par les nationaux. Elle se réunit toute contre ceux qui se mêlent du gouvernement, oîi ceux-ci, malgré leur naissance et leurs places, n’ont presque aucune part.
Rien ne nous venoit mieux que de trouver quelque bon débouché à Florence, car les auberges y sont détestables au possible ; j’y ai trouvé pis que ce que l’on m’avoit pronostiqué des cabarets d’Italie. La nuit y est encore pire que le jour ; de petits cousins, plus maudits cent fois que ceux qui sont en Bourgogne, avoient pris à tâche de me désoler, et me feront quitter Florence sans nul regret, soit parce que j’y ai été malade, soit que le mauvais temps qu’il fait m’ait prodigieusement contrarié.
La ville ne m’a pas plu en gros autant que les autres. Il y a cependant plus de curiosités d’un certain genre qu’on n’en trouve ailleurs, et à coup sûr plus de gens d’esprit