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HISTOIRE

lement. La grandeur d’âme, le zèle pour la patrie, le mépris de la vie sont aussi communs à toutes les classes. Citons un exemple entre un grand nombre qui sont à notre connaissance. Un noble du Fingo avait une femme d’une beauté rare, dont il était uniquement aimé, et qui l’aurait rendu heureux, s’il eût pu cacher son bonheur ; mais l’empereur le sut, et il lui en coûta la vie. Quelques jours après sa mort, l’empereur fit venir sa veuve, et voulut l’obliger à demeurer dans son palais. Elle répondit qu’elle était très-sensible à l’honneur que lui faisait Sa Majesté, mais qu’elle lui demandait en grâce de pouvoir pleurer son mari en liberté pendant trente jours et la permission de régaler ensuite ses parents dans le palais. Tout cela lui fut accordé, et l’empereur ajouta qu’il voulait être du festin ; il y vint en effet. Au sortir de table, la dame s’approcha du balcon, et, feignant de s’y appuyer, elle se précipita en bas de fort haut, car la fête s’était passée au dernier étage d’une tour. Elle se tua ainsi pour mettre en sûreté son honneur et satisfaire à la fidélité qu’elle avait jurée à son époux.

Les Chinois et les Japonnais ne diffèrent cependant pas en tout ; ils sont les uns et les autres également sobres et grands maîtres dans l’art de