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Mais le cavalier parisien ne s’arrêta pas là ! II courut jusqu’à Portici, vers les barques et les filets des pêcheurs naïfs. Il les entend chanter, prendre des poissons, dormir, se quereller, badiner avec femme et enfant, jouer du couteau, assassiner, et avec cela, chantant toujours. Maître Auber ! il faut l’avouer, ce fut là une fameuse course, et plus fructueuse que celle qu’on fournit sur l’hippogriffe à travers les airs où, en somme, on ne gagne que des rhumes de cerveau et des refroidissements ! Le cavalier s’en retourna, descendit de cheval, fit à Rossini un compliment extraordinairement aimable (il savait bien pourquoi), prit l’extra-poste pour Paris, et ce qu’il fabriqua là en un tour de main, ce fut la Muette de Portici[1]

Cette muette, c’était la muse désormais silencieuse du drame, qui s’en allait seule, triste, le cœur brisé à travers la foule chantante et bruyante, et qui, dégoûtée de la vie, voulut disparaître et étouffer son irrémédiable douleur dans le tourbillon artificiel du volcan théâtral.

  1. Chez les artistes de l’espèce à laquelle appartient M. Wagner, il y a toujours un fond de fou furieux, sous l’enveloppe du bouffon.
    (Note du traducteur.)