Aller au contenu

Page:Charron - De la sagesse, trois livres, tome III, 1827.djvu/181

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

accrochée, quelqu’un en passant la luy auroit dechirée ? Un vil frippier peust-estre s’en plaindroit, qui en voudroit faire son profict : mais un grand et riche s’en riroit et n’en feroit compte, comparant ceste perte au reste des biens qu’il a. Or ce corps n’est qu’une robbe empruntée, pour faire paroistre pour un temps nostre esprit sur ce bas et tumultuaire theatre, duquel seul debvons faire cas, et procurer son honneur et son repos. Et d’où vient que l’on souffre avec tant d’impatience la douleur ? C’est que l’on n’est pas accoustumé de chercher son contentement en l’ame : (…). L’on a trop de commerce avec le corps. Il semble que la douleur s’enorgueillisse, nous voyant trembler soubs elle. Elle nous apprend à nous degouster de ce qu’il nous faut laisser, et à nous desprendre de la pipperie de ce monde, service très notable. La joye et le plaisir de la santé recouvrée, après que la douleur aura faict son cours, ce sera comme une lumiere belle et claire, tellement qu’il semble que nature nous aye presté la douleur pour l’honneur et service de la volupté et de l’indolence.