Page:Chassignet - Le mespris de la vie et consolation contre la mort, 1594.djvu/164

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CLXXXIII.


Des douleurs de la mort je suis environné,
Et les perils d'enfer contre moy se redoublent,
Les torrens des pechez me noyent & me troublent
Et m'a du Tout-puissant le bras abandonné.

Les horreurs du trespas dans mon ceur estonné
Comme les eaus en mer de toutes pars se roulent,
Et mille fols pensers en mon cerveau se moulent
Aus appas de Sathan en pillage donné.

Ou recouvray je plus, dois j'avoir esperance
En la grace de DIEU, ou si la meffiance
De sa benignité s'emparera de moy ?

Je te connoy, bon DIEU, non non je me recorde
De tant de beaus effers de ta misericorde
Que quant tu me tu'rois j'espererois en toy.


CLXXXIIII.


Dieu avoit creé l'homme à sa divine image
Celeste & non sujet à putrefaction,
Mais le diable enviant nostre perfection
A la mort ravissante à ouvert le passage.

Ceus qui le vont suivant, errans à leur dommage
Se laissent transporter sans resolution
A la mort de l'esprit, mais nulle affliction
De l'homme juste & droit n'esbranle le courage.

Le fol ne croyant point d'autre vie à venir
Apres le jour dernier pense en rien devenir
Rendant par tel moyen son issue angoisseuse

Mais celuy qui scait bien que le cors abatu
De l'immortalité doit estre revestu
Mourant treuve sa mort plaisante & gracieuse.