Page:Chassignet - Le mespris de la vie et consolation contre la mort, 1594.djvu/197

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CCXXV.


EN t'EN allant, Seigneur, tu nous as en ta place
Laissé ton Saint Esprit nostre consolateur
Qui nous est envoyé du Pere createur
Le seau de ta promesse & l'arre de ta grace.

Nous estions autrefois comme une troupe grasse
De folastres brebis errantes sans pasteur
Mais ore tu nous sers de guide & de recteur
Qui du salut promis nous enseignes la trace.

¨Pourquoi serois je donc en mes maus estonné
Quoy que de toutes pars je sois environné,
Des assaus violens d'une mort infidelle ?

L'esprit de verité me guide en verité,
Et m'unissant par foy à la divinité
Me rend presque immortel en ceste chair mortelle.


CCXXVI.


DES pauvres languissans ou des riches hautains
La vie est comparable au divers navigage
Que se fait pres de l'eau à l'abvry du rivage,
Ou bien en haute mer voguant à voiles pleins :

Les uns gaignent si tost les moles plus prochains,
Vont à bort, mouillent à l'anchre, ou se sauvent à nage,
Les autres delaissez au vouloir de l'orage,
Des vens tourbillonneus sont forcés & contrains.

Allez retirez vous richesses temporelles,
Combien que vous donnies les voluptez charnelles
Aus hommes abrutis, si ne pouvez vous pas

Leur rendre de la mort plus paisible l'attainte,
Plustost vous leur donnez une plus grande crainte
De laisser en mourant vos decevans appas.