Page:Chassignet - Le mespris de la vie et consolation contre la mort, 1594.djvu/61

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LXVII.


Courans du vice bas, à la vertu supreme
Le combat est douteus, si vous en suivez l'un
Il convient entre-prendre un conflit importun
Ou nager contre l'eau avecque peine extreme :

Si vous aimez le vice, & le vice vous aime
La chair vous domtera, dont l'aiguillon commun
Comme un cruel tyran, violente chacun
Faisant que de son gré l'homme se pert soy-mesme,

Lequel suivrez vous donc si vostre passion
Vous tourmente & vous nuit, & la possession
De la ferme vertu vous offence, & vous geine ?

Miserables humains, parmy tant de combas
Apprenez à mourir, celuy la ne vit pas
Qui craint le coup certain de la mort incertaine.


LXVIII.


Vous endurez souvent, hommes de peu de ceur
Pour quatre escus de paye, une griefve blessure,
Et mettez vostre vie aus maisn de l'avanture,
Pour choses de neant qui s'usent en langueur.

Souvente-fois rongez d'une vielle ranceur
De cent fiebvres d'esprit vous souffrez la morsure,
Et tombant sans mourir dedans la sepulture
D'un remord renoissant vous transissez de peur :

Mais quant vous n'avez plus pour sortir de servage
Qu'un seul pas à sauter, vous perdez le courage,
Et le nom seulement de la mort vous abbat ;

Estimez vous celuy estre bon Capitaine
Qui conduit tous les jours ses soldats en la plaine,
Et s'enfuit laschement sur le point du combat ?