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Page:Chateaubriand - Œuvres complètes, éd. Garnier, 1861, tome 7.djvu/186

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refus sur des raisons d’État dont les chambres seront instruites quand il en sera temps. Les chambres traitées avec cet égard n’iront pas plus loin. Lorsqu’un ministre a désiré obtenir un crédit de six millions sur le grand-livre, il a donné sa parole d’honneur, et les députés n’ont pas demandé d’autres éclaircissements. Foi de gentilhomme est un vieux gage sur lequel les François trouveront toujours à emprunter.

D’ailleurs les chambres ne se mêleront jamais d’administration, ne feront jamais de demandes inquiétantes, elles n’exposeront jamais les ministres à se compromettre, si les ministres sont ce qu’ils doivent être, c’est-à-dire maîtres des chambres par le fond, et leurs serviteurs par la forme.

Quel moyen conduit à cet heureux résultat ? Le moyen le plus simple du monde : le ministère doit disposer la majorité et marcher avec elle ; sans cela, point de gouvernement.

Je sais bien que cette espèce d’autorité que les chambres exercent sur le ministère pendant les sessions rappelle à l’esprit les envahissements de l’Assemblée constituante ; mais, encore une fois, toute comparaison de ce qui est aujourd’hui à ce qui fut alors est boiteuse. L’expérience de nos temps de malheurs n’autorise point à dire que la monarchie représentative ne peut pas s’établir en France : le gouvernement qui existoit à cette époque n’étoit point la monarchie représentative fondée sur des principes naturels, par la véritable division des pouvoirs. Une assemblée unique, un roi dont le veto n’étoit pas absolu ! Qu’y a-t-il de commun entre l’ordre établi par l’Assemblée constituante et l’ordre politique fondé par la Charte ? Usons de cette Charte : si rien ne marche avec elle, alors nous pourrons affirmer que le génie françois est incompatible avec le gouvernement représentatif ; jusque là nous n’avons pas le droit de condamner ce que nous n’avons jamais eu.

CHAPITRE XVI.
QUE LA CHAMBRE DES DÉPUTÉS DOIT SE FAIRE RESPECTER AU DEHORS PAR LES JOURNAUX.

La chambre des députés ne doit pas permettre qu’on l’insulte collectivement dans les journaux, ou qu’on altère les discours de ses membres.

Tant que la presse sera captive, les députés ont le droit de demander compte au ministère des délits de la presse ; car dans ce cas ce sont