Page:Chateaubriand - Œuvres complètes t1.djvu/26

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f j PRÉFACE.

pour Jersey , et l'on nous entassa dans la cale de cette barque. Le gros temps, le dé- faut d'air et d'espace, le mouvement de la mer achevèrent d'épuiser mes forces; le vent et la marée nous obligèrent de relâcher à Guernesey.

Comme j'étois près d'expirer, on me des- cendit à terre , et on m'assit contre un mur, le visage tourné vers le soleil , pour rendre le dernier soupir. La femme d'un marinier vint à passer; elle eut pitié de moi ; elle appela son mari qui, aidé de deux ou trois autres matelots anglois, me transporta dans une maison de pêcheurs, où je fus mis dans un bon lit : c'est vraisemblablement à cet acte de charité que je dois la vie. Le lende- main on me rembarqua sur le sloop d'Os- tende ; quand nous ancrâmes à Jersey , j'étois dans un complet délire. Je fus recueilli par mon oncle maternel , le comte de Bédée , et je demeurai plusieurs mois entre la vie et la mort.

Au printemps de 1793, me croyant assez fort pour reprendre les armes, je passai en Angleterre , où j'espérois trouver une direc- tion des Princes; mais ma santé, au lieu de se rétablir, continua de décliner ; ma poi- trine s'entreprit ; je respirois avec peine.

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